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LE LENDEMAIN

un film de Magnus Van Horn.

Pour son premier film, le suédois Magnus Van Horn n’a certes pas opté pour la facilité. Le sujet qu’il a choisi de traiter exigeait de sa part la plus grande rigueur, et l’on peut dire qu’il s’y est tenu. D’autres cinéastes, pourtant plus aguerris, ont raconté des histoires semblables à celle dont il est question ici mais sans être capables d’éviter des pièges (cf. le film médiocre de Thomas Vinterberg, « La Chasse »).

Dans « Le Lendemain » cependant, contrairement à ce qui apparaît dans le film de Vinterberg que je viens de citer, on devine d’emblée qu’on a affaire à un vrai coupable. John (Ulrik Munther), le jeune homme blond que son père vient chercher à la sortie de la prison pour mineurs où il a effectué une peine de deux ans, a réellement commis un crime, le film ne laisse place à aucune ambiguïté à ce sujet. Et l’on parvient assez rapidement à percevoir de quel crime il s’agit. La question que pose le réalisateur n’est pas celle de la culpabilité, puisqu’elle est établie, mais celle de la possibilité (ou non) de la réinsertion (et, en filigrane, celle du pardon). En retrouvant son environnement d’autrefois, la ferme familiale, la vie au foyer avec son père et son petit frère, et même son lycée, et donc ses camarades de classe, qu’espère John ? Que tout va pouvoir recommencer comme avant, comme si rien ne s’était passé ?

La réalité est, évidemment, beaucoup plus cruelle que les espoirs caressés par le jeune homme. La proviseure du lycée, tout comme les professeurs, ont beau en appeler au calme et vouloir donner à John une seconde chance, celui-ci a tôt fait d’être considéré, de manière quasiment unanime, comme un paria. Du rejet l’on a vite fait d’en venir à la haine et de la haine à la violence. On devine pourtant que le garçon est habité d’un vrai désir de rachat, mais que faire quand on se heurte à un mur d’intolérance ? A la violence répond malheureusement la violence.

Le réalisateur laisse poutant entrevoir, très habilement, que le déroulement des faits aurait pu être différent. Il n’y a pas de fatalité. A plusieurs reprises, à l’occasion de plusieurs scènes, l’on pressent qu’il suffirait d’un rien, d’une parole, d’un mot, d’un geste de pardon pour changer le cours des événements. John n’attend que cela, on le sait, et si ses manières de faire apparaissent déroutantes, c’est bien parce qu’il est en quête de pardon. Seule une jeune fille semble partager un peu de sa peine et lui faire entrevoir une lueur d’espoir. Mais le malheur veut que ce soit la peur qui ait le dernier mot. Et la peur, on le sait, n’engendre jamais rien de bon.

Tout cela, le jeune cinéaste le filme avec grande maîtrise, en sachant toujours garder la bonne distance, en évitant et la froideur excessive (ou le regard clinique d’un Haneke) et son contraire le pathos. Puisse-t-il persévérer sur cette voie et l’on aura affaire, très certainement, à un cinéaste de grand talent !

J’ajoute qu’en écrivant ces quelques lignes, je ne peux pas ne pas songer à l’un ou l’autre détenu que j’ai accompagné durant le temps où j’étais l’aumônier du Centre Pénitentiaire de Meaux-Chauconin. Bien souvent, au cours des entretiens que j’avais avec les prisonniers, il était question de leur libération et de leur réinsertion futures. Et je me souviens fort bien que nombre d’entre eux étaient habités de sentiments contradictoires : d’un côté, bien sûr, ils ressentaient de la joie et de l’espoir à l’idée de sortir enfin des murs de la prison et de tout faire pour se reconstruire une vie ; mais d’un autre côté, plus d’un d’entre eux ressentaient aussi de la peur ou de l’appréhension. Retrouver son environnement d’autrefois, les gens qu’on a fréquentés, voire même ses proches, quand on est passé par la case prison, cela ne va pas de soi. Ce qu’il faut souhaiter, bien sûr, c’est qu’aucun d’entre eux ne soit en butte au rejet et à la haine comme dans ce film de Magnus Van Horn !

NOTE:  7,5/10

Luc Schweitzer, sscc.