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DALTON TRUMBO

un film de Jay Roach.

On ne compte pas beaucoup de films tournés, jusqu’à présent, sur une des périodes les plus noires de l’histoire des Etats-Unis, celle qui commence en 1947 à l’initiative du sénateur McCarthy et qui se traduit par une chasse effrénée aux communistes. La guerre froide, qui commence alors, conduit à une psychose s’emparant de tout le territoire américain. Il faut dénicher les communistes, considérés comme des traîtres à la patrie, et les traduire en justice, ce dont se charge la commission des activités antiaméricaines.
Hollywood n’est pas épargné. Dix-neuf noms de « traîtres » figurent bientôt sur une liste noire. Dix d’entre eux refusent de répondre aux questions de la commission et de donner des noms. L’un des dix se nomme Dalton Trumbo et c’est l’un des scénaristes les plus talentueux d’Hollywood. Reconnu coupable, ce dernier doit purger une peine de prison et n’est plus autorisé à signer des scénarios. Il le fera quand même sous des noms d’emprunt et, ironie du sort, se verra doté de plusieurs oscars (que, bien sûr, il ne peut recevoir en mains propres puisqu’il est contraint de travailler sous de faux noms).
Ce biopic retrace donc, de manière talentueuse et très crédible, cette sombre histoire. A cette occasion se dévoilent les comportements mesquins, voire hideux, de quelques célébrités comme John Wayne ou le futur président des USA Ronald Reagan. D’autres, au contraire, fort heureusement, font preuve d’audace et de courage en confiant du travail à Trumbo malgré les interdictions et même, pour finir, en s’efforçant de le réhabiliter. Parmi ces courageux, il faut noter les noms de Kirk Douglas et d’Otto Preminger.
S’il figure parmi les nombreuses victimes de la chasse aux sorcières qui a sévi dans ces années de guerre froide, Dalton Trumbo n’est cependant pas présenté dans ce biopic comme un saint. On a affaire à un homme courageux, à un bourreau de travail, mais aussi à un mari et à un père faisant preuve, par moments, d’une extrême dureté envers ses proches et capable d’un égoïsme peu flatteur. Mais on a également affaire à un homme intelligent, droit et généreux. Quand enfin il est réhabilité et qu’il peut à nouveau signer des scénarios sous son vrai nom, quand enfin on le félicite à visage découvert, ses mots, ses phrases de remerciement n’ont rien d’un discours convenu. Il ne prononce pas une parole de haine, il n’a pas un mot de reproche pour qui que ce soit. Au contraire, il estime que, dans cette affaire, il ne sert à rien de séparer les bons des méchants: « il n’y a que des victimes », dit-il. que des personnes qui ont été abîmées, d’une manière ou d’une autre, par le vent de folie qui s’est emparé des esprits.
Ce film de Jay Roach, magnifié par la formidable prestation de Bryan Cranston dans le rôle-titre, en donne toute la mesure. Il est superbement réalisé et véritablement passionnant, rappelant tout un pan de l’histoire américaine dont il n’est peut-être pas inutile de garder mémoire.

NOTE:  8/10

Luc Schweitzer, sscc.