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LE PAPE FRANÇOIS

un film de Beda Docampo Feijoo.

Parmi tous les genres cinématographiques, celui du film biographique (ou biopic) est sans doute l’un des plus difficiles à mener à bien de manière satisfaisante. Les pièges qu’il faut éviter sont nombreux et, si l’on n’y prend garde, on risque fort de ne proposer qu’une œuvre académique, empesée et soporifique. Preuve en est le film qui vient de paraître sur la danseuse Loïe Fuller et qui m’a semblé terne et ennuyeux du début à la fin (« La Danseuse » de Stéphanie Di Giusto 5/10). A contrario, il y a quelques mois, le film sur le scénariste Dalton Trumbo m’avait considérablement séduit. Mais qu’en est-il d’un film sur le pape François, autrement plus connu en 2016 qu’une danseuse de la fin du XIXe et du début du XXe siècle ou qu’un scénariste de l’âge d’or d’Hollywood ?

Eh bien, autant le dire sans détours, j’ai été séduit ! Certes l’on n’a pas affaire à un film mémorable mais cette réalisation m’a paru plus qu’honorable, pleine de beaux moments, de belles scènes et surtout aidant à comprendre la personnalité du pape actuel. Et c’est bien ce qu’on est en droit de demander à un film de ce genre. Bien sûr, on peut, si l’on y tient, exprimer quelques réserves ou quelques regrets. On peut, par exemple, chipoter sur l’apparence physique de l’acteur qui joue le rôle titre (Dario Grandinetti). Mais qu’importe ! Faut-il à tout prix qu’un acteur ressemble physiquement à son modèle ou ne faut-il pas plutôt qu’il s’imprègne de son esprit ? De ce point de vue il m’a semblé que l’acteur choisi remplissait plutôt bien son rôle.

Outre l’acteur principal et les autres acteurs et actrices (tous excellents), le grand point fort de ce film, c’est de s’être inspiré, pour son scénario, d’un livre écrit par la journaliste Elisabetta Piqué. Ce sont ses rencontres avec Jorge Bergoglio, futur pape François, qui ponctuent le film tout entier et introduisent à quelques moments forts de sa vie. Ce qu’on découvre du parcours du futur pape, on le découvre par le prisme d’un regard, celui de cette journaliste avec qui Jorge Bergoglio noue des liens amicaux.

On échappe ainsi, fort heureusement, au piège d’une biographie qui prétendrait à l’exhaustivité. Seuls quelques instantanés, quelques moments volés pourrait-on dire, quelques confidences faites à une journaliste apparaissent à l’écran. On est heureux de découvrir le jeune Jorge d’abord séduit par le charme d’une jeune fille puis, ayant décidé de répondre à l’appel qui fera de lui un Jésuite, annoncer cette nouvelle à sa famille (au grand dam de sa mère qui se refuse à admettre que son fils puisse choisir la voie de la vie religieuse). On le voit prendre le risque de défendre des Jésuites menacés pendant la dictature. On voit le prêtre, puis l’évêque se soucier des pauvres au point d’aller à leur rencontre même quand cela risque de déplaire à certains. On est heureux de découvrir à l’écran que, bien avant d’être pape, Jorge Bergoglio se souciait davantage de dispenser de la miséricorde plutôt que d’appliquer indifféremment des lois (fussent-elles des lois d’Eglise) !

Quant aux deux conclaves auxquels il participe, celui qui élit Benoït XVI, puis celui qui l’élit lui-même, ils sont remarquablement mis en scène. On le sait, au conclave de 2013, le premier surpris de l’élection fut Jorge Bergoglio lui-même. « Parmi les cardinaux qui l’ont élu, dit une voix off pendant qu’on les voit quitter la chapelle sixtine, il en est certains qui risquent de regretter leur vote ! ». Juste exclamation qui conclut avec malice ce film qui, sans être une grande œuvre, vaut largement la peine d’être vu ! 

NOTE:  8/10

Luc Schweitzer, sscc.