un film de Christian Duguay.
Le récit autobiographique de Joseph Joffo, grand succès de librairie à sa parution en 1973, fut talentueusement adapté au cinéma par Jacques Doillon dès 1975. On peut dès lors se demander s’il était pertinent d’en faire un remake. Pour moi, la réponse est clairement positive. Je suppose qu’aux yeux du réalisateur, Christian Duguay, il était non seulement utile mais nécessaire de proposer à nouveau cette histoire en guise de témoignage de ce que furent les terribles réalités de la deuxième guerre mondiale pour les Juifs. Il n’y aura jamais assez ni de films ni de témoignages écrits pour faire œuvre de transmission aux jeunes générations de ce que fut la terreur nazie et de ce que furent les souffrances des Juifs, c’est ma conviction.
Ce film est d’autant plus le bienvenu qu’il est réalisé avec un soin et une maîtrise qui n’ont rien à envier à ceux dont avait fait preuve Jacques Doillon. Dès les scènes d’ouverture et, en particulier, dès l’irruption de la sombre menace diffusée par les nazis au sein de la famille Joffo, nous voilà pris à la gorge. Une famille tranquille et heureuse jusque là mais dont le père (Patrick Bruel), coiffeur de son métier, et la mère (Elsa Zylberstein) pressentent rapidement que, s’ils veulent en sortir sains et saufs, il va falloir non seulement fuir mais le faire séparément : les parents d’un côté, les enfants de l’autre, tout le monde devant se retrouver en zone libre, à Nice.
Leur père leur ayant au préalable rudement appris que dorénavant il leur faudra dissimuler à tous qu’ils sont juifs, commencent pour les deux plus jeunes enfants de la famille, Maurice et Joseph (Batyste Fleurial et Dorian Le Clech), des mois et des années d’incertitude, de peur, de souffrance. Difficile de garder l’insouciance des enfants quand il faut sans cesse être sur ses gardes. Même les retrouvailles de Nice ne dureront pas bien longtemps, tant la menace ressemble à une bête féroce qui, quand on croit l’avoir semée, surgit à nouveau dans la nuit.
Par quels miracles ces deux enfants réussirent-ils à se sortir des embûches, à ne pas être lacérés par les griffes ni dévorés par la gueule de l’hydre nazie, c’est ce que raconte ce film, toujours tendu par la corde de l’émotion mais sans jamais trop en faire. On notera tout particulièrement qu’à deux reprises les deux enfants doivent leur salut à des prêtres qui, au mépris de leur propre sécurité, ont eu l’audace de s’entremettre pour eux. Ces prêtres-là méritent d’être désignés du nom de justes, sans aucun doute.
Enfin, l’on se réjouit quand le jeune Joseph, qui avait trouvé refuge au sein d’une famille redoutablement pétainiste et, bien sûr, en cachant son identité, peut, dès l’annonce de la libération (tandis que malheureusement, au milieu de la liesse, se déroulent des scènes de vengeance) clamer haut et fort « Je suis juif ! Je suis juif ! ». Finie la terreur et puisse-t-elle ne jamais ressurgir !
NOTE: 8/10
Luc Schweitzer, sscc.